đŸ•șđŸ» Alors... pourquoi on danse ?

Quand on y rĂ©flĂ©chit, la danse est une chose extrĂȘmement bizarre. Certains bruits nous donnent envie de bouger, d’une maniĂšre bien prĂ©cise, si possible en groupe
 Et on y prend du plaisir. Ce rĂ©flexe existe dans tous les pays, toutes les Ă©poques. Les bĂ©bĂ©s y sont sensibles dĂšs l’ñge de cinq mois. MĂȘme certains animaux en seraient capables - qui n’a jamais vu une vidĂ©o d'otarie dans un parc aquatique qui danse sur du Michael Jackson ?

Mais alors, la danse serait-elle naturelle ? Si oui, quels seraient ses mécanismes et sa fonction ? Voyons ce que la science peut nous dire du groove, du swing et du twerk


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La danse des neurones 

Notre cerveau est trĂšs fan de synchronisation, comme l’ont dĂ©montrĂ© les chercheurs Ă  l’aide de l’image mĂ©dicale. L’humain n’aime pas le chaos mais prend du plaisir chaque fois qu’il dĂ©tecte une harmonie, un ordre. Summum du bonheur :  voir des mouvements coordonnĂ©s affole notre centre de la rĂ©compense ; d’oĂč le plaisir instinctif ressenti devant des spectacles de danse, des poursuites de voiture ou des combats chorĂ©graphiĂ©s dans les films.

La musique, elle, stimule diffĂ©rentes zones des yeux, oreilles et du cerveau liĂ©es au plaisir, au mouvement, Ă  la motivation et la coordination. 

Tiens tiens -comme par hasard... La musique et la danse offriraient donc le plaisir d’une synchronisation !

La danse touche aussi particuliĂšrement les neurones miroirs, qui s’activent aussi bien lorsque l’individu fait une action, que lorsqu’il regarde un autre individu faire cette action (d’oĂč le terme « miroir » ). Ces neurones jouent un rĂŽle particulier dans l’apprentissage, le dĂ©sir et l’empathie. De quoi rendre la danse plus intĂ©ressante encore.

Bref. La danse active dans notre cerveau des fonctions essentielles mais aussi des fonctions sociales complexes. D’oĂč son irrĂ©sistible attrait ? pas seulement, on continue l'enquĂȘte !

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L’Etat français crĂ©e le rythme parfait


La musique classique ou les marches militaires sont peu dansantes, tandis qu’Aya Nakamura peut agiter des stades entiers. Comment l’expliquer ? D’oĂč vient la sensation que certains bruits sont “dansants” et d’autres non ? 

L’INSERM (Institut national de la santĂ© et de la recherche mĂ©dicale) s’est trĂšs sĂ©rieusement penchĂ© sur la question pour vous. Dans une vidĂ©o de la youtubeuse Scilabus, le chercheur en neuroscience Benjamin Morillon nous explique comment son travail s’est concentrĂ© sur la notion de « syncope ». Pas de panique face Ă  ce mot technique, c'est bien plus simple que vous ne le pensez :

Notre cerveau est une machine Ă  gĂ©nĂ©rer des prĂ©dictions. La perception permet ensuite de confronter ce modĂšle, et de voir si ça marche ou pas
 La syncope apporte de la surprise. Certaines notes sont dĂ©calĂ©es, des percussions ne tombent pas au bon moment, ça crĂ©e une attente
  Mais sans aller trop loin, sinon le plaisir disparaĂźt !

La musique, donc, doit ĂȘtre lĂ©gĂšrement complexe, juste ce qu’il faut. Ni trop (sinon on ne comprend plus rien), ni trop peu (sinon on s’ennuie).  Une syncope raisonnable nous pousse Ă  danser, Ă  placer des mouvements entre les notes, dans les silences, pour nous aider Ă  conserver une comprĂ©hension instinctive du tempo. 

Et pour aller plus loin
 existe-t-il un tempo idĂ©al ? En fait
 oui : 2 hertz. C'est-Ă -dire, deux mouvements par seconde. C’est le rythme habituel de notre gestuelle, au quotidien. C’est aussi le rythme de la marche Ă  pied. Et toutes les musiques qui nous donnent l’impression d’ĂȘtre boss du Dancefloor restent dans cet ordre de grandeur. 

 

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Cro Magnon dansait-il le dubstep ?

 

Bon. Comment la danse met notre cerveau en Ă©bullition ? C’est compris.  Quel rythme idĂ©al donne un maximum de plaisir ? c’est fait aussi
 Mais reste encore une question : Ă  quoi sert la danse ? Pourquoi a-t-on un tel super pouvoir ?

 Sur le sujet, les chercheurs doutent encore
 Une chose est certaine : cette habiletĂ© n’a pas Ă©tĂ© sĂ©lectionnĂ©e par hasard mais aurait Ă©tĂ©, Ă  un moment donnĂ©, profondĂ©ment utile Ă  notre survie... Par exemple, une Ă©tude de 2006 suggĂšre que la danse aurait permis Ă  nos ancĂȘtres de communiquer et de crĂ©er du lien, surtout pendant les pĂ©riodes difficiles. Les tribus ayant le sens du rythme et de la coordination auraient donc acquis un avantage sĂ©lectif sur les autres

La gĂ©nĂ©tique apporte un dĂ©but de preuve Ă  cette hypothĂšse puisque deux gĂšnes ont Ă©tĂ© identifiĂ©s chez les personnes aimant danser ; ces gĂšnes sont associĂ©s avec des prĂ©dispositions pro-sociales et pro-communicantes. Donc n’en voulez pas Ă  vos proches si certains ne sont pas les rois des chorĂ©graphies Tik Tok
la nature a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© moins gĂ©nĂ©reuse avec eux en ADN du "on va bouger/bouger".

 

D’autres chercheurs pensent que la danse Ă©tait plutĂŽt utilisĂ©e comme une forme de “parade nuptiale”, permettant de dĂ©montrer ses capacitĂ©s physiques et d’attirer des partenaires. Un peu comme chez certains oiseaux.

Enfin, certaines thĂ©ories avancent plutĂŽt que la danse est un sous-produit de l’évolution, plus ou moins accidentel, liĂ© Ă  notre capacitĂ© d’imitation vocale, indispensable Ă  l’acquisition du langage. C’est ce qu’on appelle la “vocal learning hypothesis”. Pour preuve, les animaux ayant des capacitĂ©s vocales seraient Ă©galement les plus  Ă  mĂȘme de danser. Par exemple, les perroquets, les baleines, les dauphins et certains grands singes sont capables de diffĂ©rencier et de suivre diffĂ©rents rythmes
 Ainsi, le sens du rythme serait une sorte de compĂ©tence basique, partagĂ©e par plusieurs espĂšces, mais utilisĂ©e par chacune de maniĂšre diffĂ©rente selon ses prioritĂ©s - communiquer, se coordonner pour la chasse, ou twerker en club.

Ces diffĂ©rentes hypothĂšses ne sont pas incompatibles entre elles. La danse pourrait bien ĂȘtre apparue dans la nature pour toutes ces raisons Ă  la fois...

On résume ?
Nous savons dĂ©sormais, plus ou moins, pourquoi l’humain danse. Il danse parce qu’il aime ça ; il aime ça parce que son cerveau est prĂ©cablĂ© de cette maniĂšre ; son cerveau est prĂ©cablĂ© de cette maniĂšre car une longue histoire Ă©volutive a sĂ©lectionnĂ© les individus sensibles au rythme, et plus gĂ©nĂ©ralement, Ă  la synchronisation corporelle.  

Enfin, sachez que si la danse procure du plaisir, elle est aussi excellente pour la santĂ©. Pour la prĂ©vention du cholestĂ©rol, du surpoids ou des maladies cardio-vasculaires, elle aurait les mĂȘmes effets qu’un sport d’endurance
 Sans mĂȘme que l’on s’en rende compte ! 

Alors
 on danse ?